Procès LuxLeaks :
audience du nouvel appel

Un lanceur d’alerte devant la Cour

Ce mardi 27 mars se tenait l’ultime audience du procès LuxLeaks, face à une Cour d’appel nouvellement constituée. Cette audience faisait suite à la décision de la Cour de cassation du 11 janvier dernier de casser le précédent jugement de la Cour d’appel qui avait condamné Antoine à 6 mois de prison avec sursis et une amende de 1500 €.

L’enjeu de l’audience du jour est de prendre en compte la pleine reconnaissance du statut de lanceur d’alerte notifiée par la Cour de cassation, tout en traitant le cas des documents de formation copiés par Antoine au moment du départ de chez PriceWatehouseCoopers (PwC) en 2010.

Antoine au micro des journalistes, à la sortie d’audience, entouré de Me Philippe Penning et Me William Bourdon.
© Comité de soutien à Antoine Deltour – CC BY-SA 4.0

L’Avocat général plante le décor

L’audience débute par la prise de parole de l’Avocat général John Petry. Ce dernier résume la décision de la Cour de cassation, soulignant qu’il n’y a plus lieu de se prononcer sur les faits relatifs aux LuxLeaks (divulgation des tax rulings), pour lesquels Antoine est protégé par le statut de lanceur d’alerte reconnu par la plus haute instance luxembourgeoise. John Petry semble cependant regretter cette décision, la qualifiant de « très généreuse », et insiste longuement sur le fait que seule la publication a posteriori des tax rulings permet de justifier leur vol …

Reste donc à statuer sur l’appréhension des documents de formation, qu’Antoine a copiés lors de son départ, concomitamment aux tax rulings. L’Avocat général recommande un allégement de la condamnation en appel de mars 2017 (6 mois de sursis et une amende de 1 500 €), réduite à une simple amende. Il suggère également, presque facétieusement, de réduire l’euro symbolique de dommage et intérêts pour la partie civile à 50 centimes symboliques !

Les arguments de la Partie civile

Vient ensuite à la barre Me Hansen, représentant la partie civile PwC. Sans concession, Me Hansen cherche à démontrer que la copie des documents constitue un véritable pillage de savoir-faire de l’entreprise, en détaillant le cas des 7 documents de formation auxquels Antoine aurait accédé lors de sa dernière navigation sur le serveur de PwC. Selon la partie civile, Antoine aurait voulu partager ces documents avec la concurrence ! Manifestement piqué au vif par la réaction d’Antoine au jugement de cassation, il rappelle que l’infraction ne doit pas être prise à la légère.

Antoine debout dans la salle d’audience, discutant avec Me William Bourdon.
© Comité de soutien à Antoine Deltour – CC BY-SA 4.0

La défense d’Antoine

Antoine prend brièvement la parole, rappelant notamment que « l’arrêt de la Cour de cassation est la consécration d’un combat mené depuis plusieurs années, dont [il est] très fier ».

Il est suivi par Me William Bourdon, que le Président de la Cour d’appel interrompt et invite à la concision. Me Bourdon rappelle qu’Antoine était déjà en position de lanceur d’alerte au moment de la copie, et que la décision de la Cour de cassation ne peut se résumer à un simple mécanisme de droit rétroactif. Incisif, il souligne « l’indécence » de l’acharnement la partie civile, qu’il qualifie de « mauvais perdants, qui essayent d’accrocher à tout prix une condamnation ». Il invite la Cour à prendre une décision historique, et conclut en félicitant Antoine, qui est « resté le même depuis le premier jour : simple, intègre, modeste, impeccable ».

Me Philippe Penning, avocat luxembourgeois d’Antoine, vient ensuite à la barre. Il note justement que seul 1 des 7 documents de formation précédemment décrits par la partie civile comme ayant été copié par Antoine, était présent sur son disque dur. Par ailleurs, les chiffres de pages copiées présentées par PwC ne correspondent pas à la réalité. Me Penning rappelle ensuite – études à l’appui ! – que la copie de documents de formation en quittant une entreprise est une pratique tout à fait courante. Afin de ne pas nuire à la carrière d’Antoine, la défense demande une suspension du prononcé du jugement, c’est-à-dire sa non inscription au casier judiciaire d’Antoine.

Les avocats de PwC répliquent en luxembourgeois (ou allemand ?), empêchant ainsi Antoine de comprendre et donc de répondre.

Des membres du Comité de soutien, tenant une banderole sous la pluie, sur le parvis du tribunal
© Comité de soutien à Antoine Deltour – CC BY-SA 4.0

Verdict le 15 mai

Le président de la Cour d’appel annonce la mise en délibéré. Le jugement sera prononcé le 15 mai prochain.

Cette ultime audience marque la fin du procès LuxLeaks au Luxembourg. Antoine sort du tribunal, toujours accompagné par une trentaine de membres de son Comité de soutien, qui, sans faille, l’auront encouragé jusqu’au bout de ce marathon judiciaire. Merci à eux ! Merci à tous !

Quelques membres du Comité de soutien, tenant banderole et pancarte, sur le parvis du tribunal
© Comité de soutien à Antoine Deltour – CC BY-SA 4.0

Dans la presse…